Moscou se dit prudent sur la presidentielle française
La Russie suit de près la campagne avant le second tour de l'élection présidentielle, dimanche (7 mai) et ne s’attend pas à ce que Marine Le Pen tienne forcément sa promesse de renouer de des relations si elle était élue.
"Nous avons écouté attentivement ce que chacun des 11 candidats disaient au sujet des relations avec la Russie", a déclaré l'ambassadeur russe auprès de l'UE, Vladimir Chizhov, à des journalistes à Bruxelles.
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"Ils ont annoncé des choses différentes, mais comme l'histoire récente l'a montré ailleurs, tout ce qui est dit lors d'une campagne électorale ne se réalise pas forcément après les élections," a ajouté Chizhov, quelques heures avant le débat télévisé de mercredi entre les deux candidats, Marine Le Pen et Emmanuel Macron.
Le Pen a par le passé exprimé son opposition aux sanctions européennes contre la Russie et elle a qualifié de légitime l'annexion de la Crimée par la Russie aux dépens de l'Ukraine.
Pas de soutien particulier
Lors du débat de mercredi, elle a dit qu'elle ne voulait pas d’une nouvelle Guerre Froide et que la Russie "n'a exprimé aucune hostilité envers la France". Macron l'a accusée d'être "soumise au diktat de la Russie".
La remarque de Chizhov sur "l'histoire récente", une allusion au président américain Donald Trump, indique toutefois que la Russie n'est pas certaine de ce qui se passerait si elle gagnait.
Trump avait lui aussi déclaré qu'il rétablirait les liens avec la Russie, mais il n'a pas levé les sanctions américaines contre Moscou, et en avril, il a bombardé la Syrie, allié de la Russie.
Le président russe Vladimir Poutine a accueilli Le Pen à Moscou en mars. Les banques russes ont prêté plusieurs millions d'euros au Front National et les médias nationaux russes se sont attaqués à Macron, qui soutient la position de l'UE sur l'Ukraine.
De nombreux éléments indiquent en outre que le service du renseignement militaire russe, qui relève directement de Poutine, a également piraté les systèmes informatiques de la campagne de Macron.
"Je n'ai pas remarqué que la Russie soutient en particulier l'un des candidats à la présidentielle en France", a assuré Chizhov mercredi. "Je tiens à répéter que la Russie ne se mêle pas des élections dans les autres pays".
Chizhov s'est dit "consterné" que l'équipe de Macron ait refusé que RT et Sputnik, deux médias d'Etat russes, couvrent des événements de sa campagne au motif qu'ils ont publié de fausses informations à son sujet.
Quoi qu'il arrive en France, Chizhov a assuré qu'il y avait un "accord croissant" au sein de l'UE sur la nécessité de nouer un "nouveau dialogue" avec la Russie.
Il a noté que la chancelière allemande Angela Merkel a rencontré Vladimir Poutine en Russie mardi et que le premier ministre italien Paolo Gentiloni s'y rend le 11 mai.
Il a également noté que la haute représente de l'UE pour les relations extérieures, Federica Mogherini, était à Moscou la semaine dernière et que le ministre russe des Affaires étrangères Sergei Lavrov se rendait à Helsinki jeudi et viendrait à Bruxelles.
Négociations "sectorielles"
Chizhov a expliqué qu'il serait heureux de reprendre ce qu'il appelle des négociations "sectorielles" avec l'UE, qui ont été suspendues à cause de l'intervention russe en Ukraine.
Il a déclaré qu’elles pourraient avoir lieu "au niveau des directeurs politiques ou au niveau ministériel" et qu'elles pourraient couvrir la Syrie, la Libye, Israël-Palestine et le programme nucléaire iranien.
Il a critiqué la position de l’UE dans les Balkans occidentaux, affirmant que son soutien à une coalition entre les communautés macédonienne et albanaise en Macédoine pourrait déstabiliser le pays.
Il a également déclaré que le Brexit posait des questions pour les futures relations entre le Royaume-Uni et la Russie.
Chizhov a noté qu'après avoir quitté l'UE en 2019, le Royaume-Uni ne serait pas tenu de respecter les sanctions européennes contre la Russie.
Mais "en fait, a-t-il plaisanté, "je m'attends à ce que les sanctions soient levées avant que Brexit ne soit effectif».
Il a également plaisanté qu’il était "reconnaissant" envers "les médias européens, d’avoir été assez prudents en n’affirmant pas que le résultat du référendum [sur le Brexit] l'an dernier au Royaume-Uni était dû à des hackers russes".
Le Royaume-Uni, a-t-il prévenu, devra renégocier chaque petite partie concernant les relations avec la Russie actuellement couvertes par des accords européens.
Par exemple, les accords entre l'UE et la Russie dans le domaine aérien datent des années 1950, lorsque British Airways, la principale compagnie britannique, n'existait pas encore.